Section 1 Définition et premiers exemples
Definition 1.1.
Une application \(f:E\rightarrow F\) est linéaire si:
- Pour tous \((x,y)\in E^2\text{,}\) \(f(x+y) = f(x)+f(y)\text{;}\)
- Pour tout \(x\in E\) et pour tout \(\lambda\in\K\text{,}\) \(f(\lambda x)=\lambda f(x)\)
On note \(\boxed{\mathcal L(E,F)}\) l'ensemble des applications linéaires \(E\rightarrow F\text{.}\)
Une application linéaire \(E\rightarrow E\) est appelée un endomorphisme de \(E\text{.}\) On note \(\mathcal L(E)\) l'ensemble des endormorphismes \(E\text{.}\)
Remark 1.2.
En particulier, si \(f: E\rightarrow F\) est linéaire, \(f(0_E)=0_F\text{.}\)
Une caractérisation utile:
Proposition 1.3.
Soit \(f:E\rightarrow F\) une application. Alors \(f\) est linéaire ssi pour tous \((x,y)\in E^2\text{,}\) pour tous \((\lambda,\mu)\in \K^2\text{,}\)
Proof.
On montre les deux implications.
\({\textcolor{blue}{\boxed{\Rightarrow}}}\) Supposons \(f\) linéaire. Soient \((x,y)\in E^2\) et \((\lambda,\mu)\in \K^2\text{.}\) Alors
\({\color{blue}{\boxed{\Leftarrow}}}\) Supposons que \(f\) vérifie \eqref{eq:app_lin_def}. Alors
- En prenant \(\lambda=\mu=1\text{,}\) on obtient, pour tous \((x,y)\in E^2\text{,}\) \(f(x+y)=f(x)+f(y)\text{;}\)
- En prenant \(y=0_E\) et \(\mu=1\text{,}\) on obtient, pour tous \(x\in E\) et \(\lambda \in \K\text{,}\) \(f(\lambda x) = \lambda f(x)\text{;}\)
donc \(f\) est linéaire.
Example 1.4. Les homothéties de \(E\).
Soit \(\alpha \in \K\text{,}\) alors \(h_\alpha:x\in E \mapsto \alpha x \in E\) est linéaire.
\(\leadsto\) En effet, pour tous \((x,y)\in E^2\) et \((\lambda,\mu)\in \K^2\) on a
Deux cas particulier notables:
-
si \(\alpha=0\) on obtient l'application nulle \(0_{\mathcal L(E)}: x\in E \mapsto 0_E\text{.}\)
✑ Plus généralement, l'application \(E\rightarrow F, x\mapsto 0_F\) est linéaire.
- si \(\alpha=1\) on obtient l'identité \(\Id_E: x\in E \mapsto x\in E\text{.}\)
Example 1.5. Applications définies par une matrice.
Soit \(A \in M_{n,p}(\K)\text{,}\) alors l'application
est linéaire: \(\Phi_A(\lambda X+\mu Y) = A(\lambda X + \mu Y) = \lambda AX + \mu AY\text{.}\)
Example 1.6. Un example \(\R^3 \rightarrow \R^2\).
L'application définie par
est linéaire.
En effet, soient \(u=(x,y,z),\, v=(x',y',z') \in \R^3\text{.}\) Alors
De plus, si \(u=(x,y,z)\in\R^3\) et \(\lambda\in\R\text{,}\)
Example 1.7. Un endomorphisme de \(\R[X]\).
Sur l'espace vectoriel des polynômes, l'application dérivation \(D :P \in \R[X] \mapsto P' \in \R[X]\) est linéaire:
En effet, pour tous polynômes \(P\) et \(Q\text{,}\) pour tous \((\lambda, \mu)\in \R^2\text{,}\) \(D(\lambda P + \mu Q) = (\lambda P + \mu Q)' = \lambda P' + \mu Q'\text{.}\)
Checkpoint 1.8. Projection sur un s.e.v..
Soient \(E_1, E_2\) deux s.e.v. de \(E\) tels que \(E= E_1 \oplus E_2\text{.}\) Alors les projections
sont linéaires.
Example 1.9. Contre-exemples.
-
Soit \(x_0\in E\) un vecteur non nul. La translation \(t:x\in E \mapsto x+ x_0 \in E\) n'est pas linéaire:
\(\leadsto\) En effet, \(t(0_E) = x_0\neq 0_E\text{.}\)
-
L'application \(f:(x,y)\in \R^2 \mapsto (xy,y^2-x) \in \R^2\) n'est pas linéaire: en effet
\begin{equation*} f(1,1) = (1,0) \text{ et } f(2,2) = (4,2) \neq 2 f(1,1). \end{equation*}On n'a donc pas, pour tout \(u\in \R^2\) et pour tout \(\lambda\in \R\text{,}\) \(f(\lambda u) = \lambda f(u)\text{.}\)
On peut composer des applications linéaires:
Proposition 1.10.
Soient \(E,F,G\) 3 \(\K\)-espaces vectoriels. Soient \(f\in\mathcal L(E,F)\) et \(g\in \mathcal L(F,G)\text{.}\) Alors \(g\circ f\) est linéaire.
✑ Essayez de le montrer !
Proof.
Soient \(x,y\in E\text{,}\) \(\lambda, \mu\in \K\text{.}\) Alors
Donc \(g\circ f\) est bien linéaire.
Example 1.11. Un exemple important avec les matrices.
Soit \(A\in\mathcal M_n(\R)\text{.}\) On a vu que \(\Phi_A: X\in\R^n \mapsto AX\in\R^n\) est linéaire. D'après la proposition,
est également linéaire.
En fait, on le savait déjà ! On voit en effet que \(\Phi_A \circ \Phi_A = \Phi_{A^2}\) avec \(A^2\in \mathcal M_n(\R)\text{.}\)
On peut aussi sommer les applications linéaires, et les multiplier par des scalaires:
Proposition 1.12.
Soient \(f,g \in \mathcal L(E,F)\) deux applications linéaires, et soit \(\lambda\in \K\text{.}\) Alors \(f+g : E \rightarrow F\) et \(\lambda f:E\rightarrow F\) sont des applications linéaires.
Proof.
Soient \(x,y\in E\text{,}\) \(\mu_1, \mu_2\in \K\text{.}\) Alors on a
donc \(f+g\) est linéaire.
D'autre part,
donc \(\lambda f\) est linéaire.
Ces deux opérations devraient vous rappeler quelque chose ! Vous ne serez donc pas surpris d'apprendre que:
Proposition 1.13.
\(\mathcal L(E,F)\) muni de l'addition interne \((f,g)\mapsto f+g\) et de la loi externe \((\lambda,f)\mapsto \lambda f\) est un \(\K\)-espace vectoriel.
Proof.
On sait que l'ensemble des fonctions \(E\rightarrow F\) est un espace vectoriel. Il suffit donc de montrer que \(\mathcal L(E,F)\) est un s.e.v. Or
- L'application constante égale à \(0_F\) est linéaire;
- Pour tous \(f,g \in \mathcal L(E,F)\text{,}\) \(f+g \in \mathcal L(E,F)\text{;}\)
- Pour tout \(f\in \mathcal L(E,F)\text{,}\) pour tout \(\lambda\in \K\text{,}\) \(\lambda f \in \mathcal L(E,F)\text{.}\)
Donc \(\mathcal L(E,F)\) est bien un s.e.v de l'espace des fonctions \(E\rightarrow F\text{.}\)